Comme c’est de coutume dans ce pays, l’annonce d’un changement à priori peu populaire se fait précisément à un moment où les esprits sont ailleurs… La modification de règlementation INAMI concernant les consultations à distance nous a été annoncée très courageusement, par newsletter, dans la nuit du 23 au 24 décembre dernier avec un lien vers le site officiel riziv.fgov.be détaillant le projet : Consultations à distance par des médecins : nouveau système de remboursement en 2022 - INAMI (fgov.be)
De qui se moque-t-on ? Un nouveau code de consultation téléphonique (101732) voudrait nous être imposé dès le second trimestre, réduisant le tarif à 10,10€ au lieu des 20€ actuellement et utilisable maximum 4x/an.
D’expérience, nous savons tous que le code actuel (101135), mis en place au début de la pandémie il y a 2 ans, est aujourd’hui bien intégré et une aide très utile pour nos patients ne pouvant se déplacer à cause de quarantaine ou de maladie… Mais le temps que l’on y consacre n’est pas loin de celui d’une consultation classique : écouter notre patient, ouvrir un dossier informatique, le compléter, créer les documents médicaux nécessaires (e-form, ITT, ordonnances, demandes d’examens…), tarifier et envoyer le tout par mail… Tout cela en 6 minutes chrono! De qui se moque-ton ? Il me paraît en effet inacceptable qu’un médecin gagne aujourd’hui moins de 100€ brut/h. Quant aux 4x/an c’est encore plus grotesque, sachant qu’actuellement pour traiter correctement un COVID aigu, 4 consultations/mois sont souvent insuffisantes.
Pourquoi faire un pas de côté, alors que l’évolution de notre médecine va irrémédiablement vers plus de télé/vidéoconsultation ? Même si ce n’est pas la panacée, elles peuvent avantageusement se substituer à une consultation présentielle, surtout dans le climat actuel, où la 5e vague Omicron montre que la pandémie est loin d’être tarie…
Il faut évidemment légiférer pour établir un cadre légal à ces nouveaux modes de consultation afin d’éviter les abus. Il serait sans doute opportun de n’octroyer l’utilisation de ces codes qu’aux généralistes titulaires du DMG et aux services de garde.
Une fois de plus l’INAMI a mis la charrue avant les bœufs en voulant modifier « à la va-vite » et sans une réflexion approfondie le code 101135 qui pour l’instant soulage médecins et patients de ce contexte sanitaire difficile.
D’autant que nos patients ont pris goût à ces téléconsultations. Ils continueront donc de nous téléphoner et ne comprendront pas qu’on leur demande de revenir au cabinet ! Les premières victimes de ces changements seront les patients âgés, ayant du mal à se déplacer et les personnes paupérisées, très intéressées par les consultations téléphoniques.
Pour être complet, deux autres codes destinés aux vidéoconsultations (101673) pour généralistes et (101695) pour spécialistes seront proposés au tarif de 22,44€/consultation mais également limités à 4x/an. Il serait intéressant que les têtes pensantes de ce genre de réforme nous expliquent sur quels critères ils se basent pour définir ces tarifs et ces fréquences improbables ? Pourquoi une consultation vidéo serait-elle moins bien rémunérée qu’une consultation normale ?
Le GBO/Cartel a réagi en envoyant une lettre ouverte à Frank Vandenbroucke, Ministre des Affaires sociales et de la Santé publique pour adopter une attitude réfléchie et constructive dans ce dossier. Les téléconsultations correspondent aujourd’hui à une réalité du terrain et aux besoins des patients qui doivent être pris en compte. l’ABSyM, quant à elle, propose un ticket modérateur de quelques euros, chose qui nous semble ingérable dans le cadre de la médecine générale.
En attendant, comme on est jamais mieux défendu que par soi-même, une pétition générée par des médecins généralistes est actuellement en circulation. Dès à présent, ceux qui veulent la signer sont invités à se rendre sur le site :
https://www.petitionenligne.net/contre_la_reforme_inami_des_consultation_a_distance
*En remerciant le Dr Christophe Dupont de nous avoir averti de cette tentative de l’INAMI de vouloir faire passer en douce, durant la trêve des confiseurs, un projet bâclé et inabouti.
Excellent week-end à tous
Dr Patrick De Moor
Médecine généraliste
Directeur Médical
Vivio-Vivactis Group
L’équipe de rédaction Tempo Today
Je suis absolument sidéré.
Une consultation téléphonique COVID selon le témoignage de nombre de mes patients dure en général moins de 3 minutes, et se solde par un conseil sommaire et abscons : "attendez et prenez du Dafalgan". Cette attitude d'une majorité de généralistes doit être considérée comme un manquement grave à la déontologie et pire, à la plus simple humanité.
La téléconsultation est un contre-sens absolu et les 20, les 10, ou les 2 euros que la société pourrait consacrer à cela relève du vol organisé d'argent public. Je suis extrêmement heureux d'avoir quitté les chambres syndicales. J'en ai été administrateur un bref temps, malheureusement juste après Wynen... Elles sont aujourd'hui devenues un simple marché persan...