La résistance aux antibiotiques est une préoccupation majeure pour la santé mondiale. Le problème est particulièrement vif dans les pays d’Afrique subsaharienne, et les enfants ainsi que les nouveau-nés sont particulièrement exposés. Ainsi, 30 % des nouveau-nés atteints de septicémie (sepsis), une réaction inflammatoire grave à la suite d’une infection, décèdent à cause de résistances aux antibiotiques. Cependant, peu de données épidémiologiques existent sur l’incidence de ce fléau chez les enfants.
Présence massive d’entérobactéries résistantes lors d’infections sévères
La première revue systématique de la littérature visait à évaluer la proportion d’entérobactéries résistantes aux antibiotiques chez les enfants en Afrique subsaharienne lors d’infections. Ces bactéries, très fréquemment retrouvées dans les infections sévères, sont connues pour leur capacité à développer des résistances aux antibiotiques. L’équipe a extrait les données de 112 études, avec plus de 30.000 échantillons de sang, d’urine et de selles d’enfants âgés de 0 à 18 ans, afin de réaliser leur méta-analyse.
« Nous avons observé une forte proportion de bactéries résistantes aux antibiotiques, notamment pour celles trouvées dans le sang des jeunes patients et patientes », indique la Dre Noémie Wagner. Les espèces les plus fréquentes sont l’Escherichia coli (E. coli) et les Klebsiella spp. L’équipe de recherche a observé des proportions élevées de résistance à l’ampicilline et à la gentamicine, soit les antibiotiques recommandés en 1ère intention dans les sepsis. Pour E. coli, ils atteignaient ainsi 92,5 % pour l’ampicilline et 42,7% pour la gentamicine. Les souches de Klebsiella spp, toujours résistantes à l’ampicilline, présentaient des proportions de résistance de 77,6 % à la gentamicine. Les entérobactéries analysées montraient également des proportions élevées de résistance aux céphalosporines de troisième génération, qui représentent la 2e ligne de traitement du sepsis de l’enfant, avec respectivement 40,6 % des échantillons d’E. coli et 84,9 % des échantillons de Klebsiella spp résistants. Ces résultats suggèrent donc une proportion très élevée de résistance aux antibiotiques recommandés en première et deuxième lignes pour les sepsis de l’enfant.
La seconde étude a voulu estimer, toujours à travers une revue systématique d’études et une méta-analyse, la prévalence du nombre d’enfants colonisés par des entérobactéries résistantes aux céphalosporines de 3ème génération. Le terme colonisation désigne le fait de retrouver des bactéries dans les selles d’un enfant, sans infection existante.
Au total, 40 études ont été retenues, représentant une cohorte de 9 408 enfants. Il en résulte que 32,2% des enfants sont porteurs d’entérobactéries résistantes aux céphalosporines à large spectre. L’étude révèle également que 53,8 % des enfants entrés à l’hôpital sans être porteurs d’entérobactéries résistantes sont ressortis positifs pour ces bactéries. Ce travail démontre, enfin, que le risque d’être porteur d’une entérobactérie multirésistante est trois fois plus élevé après avoir reçu un traitement antibiotique trois mois auparavant. Or, en Afrique subsaharienne, entre 83 % et 100 % des enfants hospitalisés sont traités avec des antibiotiques.
Ces chiffres très élevés sont alarmants, car ils sont notamment largement supérieurs aux estimations faites dans le passé. Ils soulignent l’urgente nécessité d’actions ciblées pour gérer et réguler la résistance aux antibiotiques en Afrique subsaharienne.
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L’équipe de rédaction Tempo Today