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L’édito de notre Dir Med: « Grand corps médical malade… »

« La médecine est un art, une vocation, un apostolat… Les médecins sont dévoués, impliqués et ne comptent pas leurs heures pour soigner leurs patients…  C’est une profession valorisante humainement et socialement… » Voilà ce que l’on pouvait entendre de notre beau métier ! Alors d’où vient cette lassitude qui taraude et épuise le corps médical? Pourquoi les médecins craquent-ils ?

La réponse est complexe et multifactorielle… Nous sommes entrés dans une ère où le médecin devient peu à peu un instrument de la médecine et non le contraire. Les progrès technologiques qui devaient au départ lui venir en aide, sont en train de le supplanter. Du statut de «décideur », il risque fort de basculer vers celui de simple « exécutant ».

Les médecins de ma génération (les 50 ans et plus) basaient leur diagnostic sur un examen clinique minutieux et une bonne connaissance de la sémiologie. Les examens complémentaires venaient alors en support pour conforter leur hypothèse. Aujourd’hui, en observant nos jeunes confrères, j’ai parfois l’impression que le principe s’est inversé… Ils prescrivent une multitude d’examens techniques sur lesquels ils forgent leur diagnostic.

On ne peut perdurer dans une profession aussi chronophage et lourde en responsabilités que si la satisfaction qui en découle est au moins égale aux contraintes qu’elle nous imposent…

Seulement voilà, cette satisfaction s’étiole, et avec elle, la combativité, la persévérance et le dévouement, qualités indispensables pour être et rester un médecin efficient.

Les patients aussi semblent avoir un autre regard sur leur médecin : de confident, faisant presque partie de la famille, il est devenu un simple prestataire de soins, et la médecine un « dû » avec le droit d’être soigné quasi gratuitement.  Le respect et la reconnaissance s’estompent. Le taux d’agression verbale et même physique est en constante augmentation et le nombre de procès à l’encontre des médecins, de plus en plus fréquents…

Depuis la pandémie de la Covid-19, les softwares médicaux ont évolué à toute vitesse, ce qui en soi est sans doute une bonne chose - sauf que certains d’entre nous, peu habitués à l’informatique, n’ont pas eu le temps de s’adapter au point d’être contraints d’arrêter prématurément leur pratique médicale. Et pour ceux qui sont parvenus à prendre le train en marche, la charge administrative qui en découle a été décuplée. Absolument tout doit être encodé et j’ai parfois la désagréable impression, en consultation, de parler plus à mon ordi qu’à mon patient…

Épuisement professionnel, démotivation, stress, anxiété, burnout, addictions, surconsommation de psychotropes, suicides… sont hélas le corolaire néfaste et parfois dramatique de cette évolution précipitée du monde médical. Une a.s.b.l « Médecins en difficultés » a même été mise en place pour fournir une assistance psychologique aux médecins. En contactant une responsable de cette plateforme pour obtenir de plus amples informations voici ce qu’elle m’a répondu :

« Notre activité et action principale est entièrement tournée vers l’aide aux médecins en difficulté, nous projetons 500 appels d’aide cette année. Le vendredi est une journée particulièrement chargée dans le cadre de nos accompagnements, la veille du week-end est difficile pour beaucoup de médecins qui vivent soit un épuisement, soit une dépendance ou ont été victime d’agression. Pour les envies suicidaires, nous sommes dans une dimension extrêmement délicate et dangereuse comme vous le comprendrez… »

La nouvelle génération de médecins a tiré les leçons qui s’imposent et leur mode de fonctionnement sera très différent… Ils travailleront en équipe, avec des horaires bien définis et seront préférentiellement rémunérés au forfait  plutôt qu’à l’acte. Afin de préserver au mieux leur vie privée, ils deviendront en quelque sorte des fonctionnaires médicaux de l’état.

Le problème est que cela ne résoudra pas la carence en médecins généralistes qui s’accentue irrémédiablement puisqu’il faudra 2,6 nouveaux médecins pour en remplacer 1 actuel, et que la profession autrefois plébiscitée, a perdu ses lettres de noblesse et aujourd’hui n’attire  plus autant de vocations…

Ne croyez-pas pour autant que j’ai sombré dans le défaitisme ou le fatalisme, mais il faut bien reconnaître que le monde change et avec lui, la profession médicale dans son ensemble. Cette transition, qui s’est brutalement accélérée, a de quoi en perturber et en décourager plus d’un !

Pour paraphraser Arthur Schopenhauer,  je dirais que : « tout processus évolutif est d’abord décrié, subit ensuite une forte opposition et pour finir est considéré comme ayant toujours été une évidence ». Espérons qu’il en soit ainsi avec l’évolution de notre profession…

 

Dr. Patrick De Moor

 

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5 comments on “L’édito de notre Dir Med: « Grand corps médical malade… »”

  1. Tout à fait exact! Quand les patients et les politiques auront bien démoli les médecins et l'envie de devenir médecin, ils s'étonneront de ne plus avoir personne pour les soigner...

  2. Merci pour cette analyse juste et vraie.Une génération sacrifiée,qui fera place à cette nouvelle ère dans tous les domaines.Un tournant fracassant dont ,nous les vieux,sommes des témoins impuissants et tristes. Essayons de maintenir une vision optimiste pour un devenir meilleur et différent. Je rejoins Arthur Schopenhauer,mais tout cela va tellement vite,que la "casse" risque d'être lourde, et l'homme reste fragile...devant l'adversité. Courage,bonne volonté,et ne perdons pas confiance dans la résilience de l'être humain.Jaja.

  3. La médecine est un art, une vocation, un apostolat…

    Ou plutôt, ÉTAIT un art, etc. ÉTAIT !
    Tant à Epidaure qu’à Lambaréné, jusqu’au tournant de WWII, depuis l’Antiquité, ces activités étaient principalement bénévoles ou presque. Les médecins furent longtemps librement « honorés » ─ le mot est explicite ─ par leurs Patients selon leurs moyens.
    Mais c’est un temps révolu. Irrémédiablement. Et pas d’aujourd’hui. Triplement révolu.

    Le "bon docteur" qui prenait des patients en charge "techniquement" mais surtout moralement (parfois socialement et même sentimentalement) est mort. Étouffé tout d’abord, principalement par les exigences, les caprices de populations "qui ont des DROITS".

    Ensuite par la sujétion asphyxiante de leur activité aux nécessités de comptabilités publiques sans cesse plus complexes et par des régulations invivables.

    Enfin et surtout par le déclassement social.
    Rien de tout cela n'est réversible. C'est cassé. Définitivement brisé.
    Il faudra non pas "faire avec" mais faire SANS le "bon docteur". A charge pour nos populations de s’accommoder du résultat de leurs exigences, de s'accommoder de "techniciens-médecins" aux 35 heures "syndicales" et tout le toutim, les récupérations après nuits, WE, etc.

    J’ai retrouvé le livre-journal fiscal d’un médecin du siècle passé. Vers 1955, chaque consultation devait y être individuellement rapportée. CHACUNE, isolément, était une rentrée suffisante pour intéresser le fisc. Aujourd’hui, je dois rapporter dans le mien le total des honoraires de chaque bloc d’attestations, un « carnet » de CINQUANTE consultations. Cinquante ! Vous avez dit déclassement financier et social ?

    Aujourd’hui, nos populations exigent la dispensation de soins UNIFORMES à tous leurs citoyens sur un mode militaro-industriel. Mutualités comme ministres (En avons-nous assez ?) s’affairent à organiser cela de manière coercitive.
    Les soins sont devenus une marchandise comme une autre. Les soignants se retrouvent dès lors au rang des guichetières des bureaux de la Poste. La même marchandise doit être disponible (et identique !) dans chaque localité au même prix.

    Cette dégringolade est strictement parallèle dans les soins et dans l’enseignement.
    Le vocabulaire est cruel. L’ « instit’ » et la « prof » ont remplacé le « maître d’école » et le « professeur de français ». En néerlandais, c’est la « juf’ », comme on disait jadis « la fille de quartier » pour une femme d’ouvrage dont l’identité était indifférente.
    Pour les soignants, tous, les textes sacrés actuels ne parlent plus de médecins mais de « praticiens professionnels ». (Une exception : le Code pénal s’intéresse encore aux « médecins »! Agréable sollicitude.)

    Et ce n’est hélas pas en exposant la misère de nos systèmes d’enseignement et de dispensation des soins qu’ils attireront nos jeunes (pas plus que la visite d’une prison puante et délabrée ne suscitera des vocations de gardiens…).

    Un rattrapage est-il possible ? Nos concitoyens ne semblent pas près de tenter d’inverser la vapeur. Nos ministres successifs et les partis qui les intronisent ne semblent vraiment pas disposés à s’opposer à leurs électeurs.

    L’heure est à la consultation à dix balles, voire à cinq si possible.
    Il est moralement impératif d’en avertir les jeunes gens qui songent à s’engager dans ces études.
    Leur avenir : enseignement et soins « McDo » surveillés constamment par un « reporting » informatique continu.

    Un exemple : INAMI :
    « Quels sont les changements entrés en vigueur le 1er octobre 2017 ?
    A partir du 1er octobre 2017, vous devez obligatoirement compléter l’adresse du lieu de soins sur le formulaire de l’échelle d’évaluation ou dans le message 410 000 de MyCareNet (=Notification d'une demande de forfait A, B, C ou toilette, ou d'une demande de modification ou de prolongation d'une notification préalablement acceptée).
    Dans des cas exceptionnels, si vous deviez utiliser d’anciennes versions papier du formulaire après le 1er octobre 2017, il vous faudra les adapter manuellement pour qu’elles soient conformes à la nouvelle version.
    • La durée de validité du formulaire de l’échelle d’évaluation que vous avez introduit auprès de la mutualité de votre patient, est limitée à 3 mois.
    • Vous devez notifier à la mutualité de votre patient la fin anticipée ou l’interruption égale ou supérieure à 10 jours calendrier, des soins infirmiers relatifs à une demande ou une notification pour des honoraires forfaitaires ou des toilettes.
    En cas d’opposition du médecin-conseil ou du Collège national des médecins-conseils, le refus d’intervention de l’assurance soins de santé pour vos prestations basées sur l’échelle d’évaluation, porte sur toutes vos prestations effectuées à partir du 1er jour de traitement compris (et non plus à partir de la date de la notification d’opposition). Cette opposition est portée à votre connaissance par voie électronique via MyCareNet et à la connaissance de votre patient par courrier postal. »

    En pratique, dans le meilleur des cas, l’autorisation très humblement sollicitée par un médecin est « accordée » par des commis de bureau sans formation médicale et même de plus en plus souvent par des automates. (Le nombre invraisemblable de ces milliers de demandes quotidiennes dépasse de loin les capacités de la petite escouade de médecins-conseil des mutualités.)

  4. Société de consommation! On consomme du soin, et du médecin, comme n'importe quelle autre marchandise. de plus, offerte pour "pas cher" par les politiques... comparez vos "honoraires" style aumône, à ceux de professionnels du même niveau d'étude!?!
    Société de chosification des êtres! Nous sommes devenus des prescripteurs, de drogues, choisies ou imposées, par labos, spécialistes, EBM, bientôt IA.
    Le patient est devenu une machine à réparer, sans âme , sans esprit...: nous sommes devenus inhumains...

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