L’édito de notre Dir Med: « Après les PFAS, les PCB… »

Nos équipements électroménagers et matériels électroniques usagers, nos voitures, nos vieux fers atterrissent en fin de vie dans des usines, surnommées les "broyeurs à métaux", pour y être triés et réduits en limaille. En Belgique, ce secteur recycle chaque année plus de 3 millions de tonnes de ferraille qui sont réinjectées en grande partie dans la sidérurgie. Lors d’une enquête effectuée en 2021 par l’équipe d’#Investigation® de la RTBF®, on découvrait que ces broyeurs étaient de très gros émetteurs de polychlorobiphényles (PCB).

Interdits depuis 1986 en Belgique, les PCB considérés comme cancérigènes, étaient utilisés massivement dans l’industrie électrique (isolants, condensateurs, transfos, résistances…). Ils sont ininflammables et très stables. Ce sont aussi des perturbateurs endocriniens qui s’accumulent dans la chaîne alimentaire, se stockent dans les tissus gras et sont extrêmement persistants. Leur durée de vie dans l’environnement 

peut aller jusqu’à plusieurs centaines voire milliers d’années à l’instar des PFAS.

Pour respecter les nouvelles normes de 100 ng/m³, fixées en 2018 par la Wallonie, les broyeurs se sont équipés de systèmes de filtration (au charbon actif) à la sortie des cheminées industrielles afin de réduire les quantités de PCB rejetées dans l’atmosphère. Il faut malheureusement constater que leurs efforts pour se mettre en règle n’ont pas abouti aux résultats escomptés.

Les cheminées des broyeurs ne sont en effet pas la seule source d’émission de polluants. Le déchargement et la manutention de la mitraille génèrent énormément de poussières. C’est ce que l’on appelle les émissions diffuses. Ces poussières toxiques qui s’envolent contiennent également des PCB, des dioxines et autres substances nocives pour notre santé.

Le constat est sans appel, les filtres n’ont pas réglé le problème, et dans les retombées atmosphériques

les dépassements restent impressionnants. Pour le PCB 126, cancérogène avéré, les taux mesurés sur ces sites industriels se sont révélés de 12 à 597 fois supérieurs  aux normes admises. C’est également le cas pour les dioxines et les PCB "dioxine like" qui ont enregistré des taux mesurés entre 43 et 68 fois

au-dessus des valeurs autorisées… Ces analyses sont effectuées à partir des jauges OWEN, sorte d’entonnoir, réparties sur les sites et récoltant les poussières émises lors des différentes manipulations.

Ces dépassements ont été présentés à Catherine Bouland, professeure en santé environnementale à l’Ecole de Santé publique de l’ULB, qui s’inquiète de l’impact de cette pollution atmosphérique par les PCB ou dioxines, sur le corps humain. Les conséquences de ces perturbateurs endocriniens sont surtout dangereuses pour les enfants au niveau de leur croissance, de leur développement intellectuel et de la reproduction.

Nous voilà donc une fois de plus confrontés à une pollution environnementale par des produits chimiques que nous avons créée. L’intention de vouloir recycler les vieux métaux comme les eaux usées, ne peut être que louable, malheureusement les méthodes employées laissent encore à désirer puisqu’elles génèrent à leur tour d’autres pollutions…

Espérons qu’un jour l’être humain parvienne à créer sans polluer, à vivre sans surconsommer et à préserver la nature qui nous nourrit et nous apporte les éléments indispensables à notre bonne santé…

Très bon week-end à tous

Dr. Patrick De Moor

Référence : l’émission d’#Investigation® de la RTBF® diffusée ce 23 janvier dernier