L’édito de notre Dir Med: « Balthazar et Alexandra font des émules… »

Les séries télévisées mettent aujourd’hui en exergue ce métier longtemps resté dans l’ombre et font du médecin légiste un personnage-clé pour l’intrigue. Citons : Balthazar (1^ère diffusion en 2018), Alexandra Ehle (2018), Dr Harrow (Australie 2020), Bones (2005), NCIS : Enquêtes spéciales (2003)… et bien d’autres encore, où le personnage du légiste à toujours quelque chose de particulier et d’un peu fantasque, comme s’il devait compenser son « triste » métier par un côté « caustique et décalé »…

Le médecin légiste, c’est l’art de faire parler les morts… mais aussi les vivants !⁽¹⁾ Son rôle est également de prendre en charge les victimes vivantes d’agressions physiques ou sexuelles. « L’examen médico-légal a pour but de constater les lésions traumatiques et de déterminer si celles-ci sont compatibles ou non avec l’histoire traumatique rapportée par la victime. Cet examen permet aussi de déterminer l’Incapacité totale de travail (ITT) pénale qui en découle, car en cas de coups et blessures, cette période d’ITT est l’un des facteurs qui aide le magistrat à qualifier l’infraction commise par l’auteur des faits », nous explique le Dr. Annie Geraut, Médecin légiste à l’institut de médecine légale de Strasbourg. 

Le médecin légiste est ce que l’on appelle un auxiliaire de justice : il intervient, à la demande d’une autorité judiciaire (magistrat, Parquet, juge d’instruction, etc.), dans 3 domaines : la médecine légale du vivant, la thanatologie ou science des morts et les expertises médicales, et il est, à ce titre, indispensable au bon fonctionnement de la justice.⁽²⁾

Dans son 4^ième ouvrage : « En direct de la morgue », le Dr Michel Sapanet, chef de l'Institut médico-légal du Poitou-Charentes au CHU de Poitiers et expert judiciaire, nous confie :

« J'ai longtemps pensé que la curiosité pour la médecine légale avait quelque chose de morbide… mais en réalité, la mort fascine car elle est le point commun à chacun d'entre nous. Et pour nous, légistes: notre respiration, c’est l’énigme ! »⁽³⁾

Un réel engouement pour la médecine légale est né avec la découverte sur petit écran de cette obscure profession… « Entre 1993 et 2006, je n’ai pas eu une seule demande », nous avoue Michel Sapanet, mais depuis nous sommes contraints d’en limiter l’accès…

Mais pour devenir médecin légiste, il faut franchir toutes les étapes du cursus des études de médecine et se spécialiser ensuite en médecine légale et expertise médicale, soit 10 ans d'études au total, pour un salaire avoisinant 3 000 € à 3 500 € brut/mois, pour un légiste débutant et jusqu’à 11 000 € /mois en fin de carrière. De quoi faire réfléchir…⁽⁴⁾

En Blelgique, en termes de criminalité avec atteinte à l’intégrité physique, depuis 10 ans, les chiffres sont en baisse : de 90.130 faits répertoriés en 2011, ils y sont passés à 62.158 en 2022.⁽⁵⁾  Preuve, s’il en est, que nos légistes et notre police scientifique en ont dissuadé plus d’un de commettre un crime avec l’espoir qu’il reste impuni…

Métier, certes passionnant mais très exigeant et parfois risqué, je souhaite une sacrée dose de courage au légiste qui devra remettre ses conclusions sur la mort, accidentelle ou non, d’Evguéni Prigojine, chef de la milice Wagner…

Excellent week-end à tous.

Dr Patrick De Moor

(1) https://www.profilmedecin.fr/contenu/medecin-legiste-lart-de-faire-parler-les-morts-et-les-vivants/

(2) https://medecinelegale.com/index.php/la-profession-de-medecin-legiste/

(3) https://www.lefigaro.fr/actualite-france/michel-sapanet-la-medecine-legale-exerce-une-fascination-20201130

(4) https://www.cidj.com/metiers/medecin-legiste#:~:text=%C3%89tudes%20%2F%20Formation%20pour%20devenir%20M%C3%A9decin,ans%20d'%C3%A9tudes%20au%20total.

(5) https://www.police.be/statistiques/fr/criminalite/tendances