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Pourquoi les services d’urgences hospitaliers sont-ils à ce point encombrés ? En me rendant hier dans le service des urgences d’une clinique bruxelloise, totalement « overbookée », j’ai tendu l’oreille pour essayer de comprendre le motif de cet engorgement… Et je ne fus pas déçu…
Un homme en bleu de travail, se présente au guichet… « Bonjour, pourquoi venez-vous » ? « J’ai mal à l’oreille ». Vous n’avez pas un médecin traitant ? « Euh non, enfin oui, mais pas vraiment … Et puis c’est plus facile pour moi de venir ici pendant mes heures de travail ». Une femme, pour faire changer son pansement suite à une petite intervention réalisée il y a quelques jours par son dermatologue… Une autre, soudainement très inquiète par un naevus présent depuis plusieurs mois, qui soudain ne peut attendre un jour de plus… Bref, la plupart des patients présents dans cette salle d’attente n’avaient absolument rien à y faire ! Alors pourquoi une telle dérive ?
La réponse est, comme souvent, multifactorielle… Commençons par les patients eux-mêmes, qui ne savent plus attendre… Nous sommes vraiment dans l’air de « l’immédiateté ». J’ai mal, je consulte. Et peu importe si je dois faire la file dans un service d’urgences, aujourd’hui ça m’arrange, j’ai le temps, en plus je ne dois pas payer directement ma consultation et, avec un peu de chance, je ne la payerai jamais…
Le financement des services d’urgences étant au prorata du nombre de passages, les cliniques et hôpitaux ont tout intérêt à accepter un maximum de patients. Quitte à les faire attendre plusieurs heures en fonction du degré d’urgence. Il existe en effet une grille de régulation des urgences établie en 8 niveaux de gravité, pouvant donner lieu à différents envois de moyens (SMUR, PIT, ambulance, MG) et à un délai d’intervention variant en fonction de l’urgence.(1) Dans cette grille, les 3 derniers niveaux sont du ressort de la médecine générale… Ceux-là ne devraient en tout cas pas être admis dans un service d’urgence et pourtant, trop souvent, ils le sont…
Sans doute pas assez nombreux sur l’ensemble du pays, il existe également des « postes de garde en médecine générale ». Au nombre de 6 à Bruxelles, ils sont souvent situés à proximité des centres hospitaliers. Une convention de collaboration entre hôpitaux et postes de garde aurait donc dû permettre à certains services d’urgence de se délester du trop-plein de leurs patients « non urgents », mais dans la pratique, ce switch ne semble pas fonctionner, sans doute en raison du type de financement évoqué plus haut.
Reste un numéro d’appel téléphonique national, le « 1733 » sensé désengorger le « 112 ». Pour les appels en médecine générale, un répondeur automatisé vous redirige, en fonction de votre langue et de votre code postal, vers un opérateur, qui en journée, en fonction d’un listing de médecins disponibles, essaye de vous adresser à un généraliste et en soirée vous oriente vers un des postes de garde. Mais en pratique, ce numéro semble largement sous-exploité, par méconnaissance ou par désintérêt, puisque les patients de médecine générale continuent d’affluer et d’encombrer inutilement les services d’urgence.
Mais où sont les généralistes ? Et pourquoi ne parviennent-ils pas à drainer ce trop-plein de patients se présentant spontanément dans les services d’urgence ? Certes, dans plusieurs régions du pays, certains de nos confrères sont réellement débordés et en sous effectifs, mais ce n’est probablement pas encore le cas dans les grandes agglomérations. Il est rare qu’un généraliste ne puisse pas recevoir son patient dans les 24 à 72h en fonction du degré d’urgence potentielle. Seulement voilà, une fois encore, les patients ne sont plus patients et devront s’acquitter sur place d’une partie ou de la totalité du montant de la prise en charge.
Il faut aussi admettre que, pour une question de qualité de vie, la nouvelle génération de médecins généralistes a une autre façon de fonctionner, souvent en équipe, et avec des horaires nettement plus restrictifs. Au point qu’il semble établi que pour remplacer 1 médecin traitant actuellement en fonction, il en faudra 2,7 pour couvrir la même patientèle.
Nos politiciens et les instances mutualistes jouent un rôle très néfaste dans cet état de fait. A force de mettre dans la tête des gens que la médecine devrait être « gratuite pour tous », à ne pas confondre avec « accessible à tous », les patients, alors qu’ils sont prêts à investir des milliers d’euros pour leurs animaux de compagnie, des produits de parapharmacie, leur coiffeuse et esthéticienne, les smartphone et autres accessoires multimédia… trouvent de plus en plus anormal de devoir payer leur médecin…
Très bon week-end à tous
Dr. Patrick De Moor
Références :
(1) https://www.health.belgium.be/sites/default/files/uploads/fields/fpshealth_theme_file/manuel_regulation_medicale.pdf
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trop vrai!!!
bonjour, je suis surpris par votre lucidité.
Bonjour, j'ai lu avec intérêt votre article et je suis d'accord avec de nombreux points .
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec le paragraphe "mais où sont les médecins généralistes" et avec son développement .
Je suis pour ma part médecin spécialiste mais je tiens en préambule à dire que j'ai la plus grande admiration pour les médecins généralistes qui doivent être polyvalents contrairement à moi qui suis focalisé sur ma spécialité, et que je ne demande qu'à collaborer avec eux .
Cependant, même dans l'agglomération liégeoise, force est de constater que de nombreux patients n'arrivent plus à contacter leur médecin généraliste, et lorsqu'il y arrive, ont parfois un rendez-vous deux, trois, ou quatre jours plus tard .
Les rendez-vous doivent parfois être pris sur internet, que certaines personnes âgées n'ont pas .
Donc faut-il s'étonner qu'ils se rendent aux urgences ?
Donc oui il y a un problème au niveau des patients qui veulent tout tout de suite, oui il y a un problème au niveau des hôpitaux qui acceptent tout et n'importe quoi pour des raisons budgétaires ( mais ils sont sous financés ) mais il y a aussi un réel problème au niveau de la médecine générale qui doit rester la première ligne pour la prise en charge d'un patient !
copy paste d'une situation que nous vivons aussi au GDL
M. De Moor a-t-il déjà souffert d'un bouchon d'oreille ? Ça ne menace sans doute aucun organe (et encore) mais ça ne se supporte pas longtemps. Mieux vaut trouver rapidement quelqu'un de compétent pour le faire sauter. Pas toujours évident...
M.De Moor a bien circonscrit le problème. On pourrait rajouter 1/ que les urgentistes eux-mêmes sont les premiers à se plaindre de l'excès de travail en salle d'urgences, 2/ que la mauvaise réputation des soins donnés dans ces salles se vérifie tous les jours et que ce fait n'est pas toujours lié au manque d'expérience des urgentistes mais est en partie lié au manque de temps consacré à chaque patient vu leur nombre excessif. 3/ les généralistes se plaignent du fait que les patients filent aux urgences directement mais oublient que cela est dû en partie à leur manque de disponibilité.
Les remèdes ?
D'abord, changer la subsidiation des urgences en une forfaitarisation (les hôpitaux auront alors intérêt à limiter les entrées). Mais rejeter les patients dans le circuit de la MG nécessite de pouvoir les intégrer.
Il est donc impérieux d'augmenter la disponibilité des généralistes : mais comment ? J'ose à peine vous dire que je reçois tous les soirs sans RV au finish car je risque de me faire clouer au pilori ! Je veux faire remarquer à contrario que recevoir exclusivement sur RV, 3 jours par semaine, jusque 18h, ne va pas solutionner le problème de notre disponibilité !