Les étonnantes capacités de mémoire sémantique chez un adolescent atteint d'amnésie sévère

Le jeune patient, identifié sous le pseudonyme de C.J., fut diagnostiqué à l’âge de 11 ans avec des métastases cérébrales multiples provenant d’une tumeur germinale maligne d'origine testiculaire. Malgré une thérapie efficace combinant radiothérapie et chimiothérapie, C.J. a développé une atrophie cérébrale étendue avec une réduction bilatérale notable du volume hippocampique, une région cérébrale essentielle pour la mémoire épisodique.

En conséquence, C.J. présente une amnésie épisodique marquée, se traduisant par une incapacité quasi-totale à se souvenir d'événements personnels ou quotidiens. Toutefois, son cas est remarquable par la préservation surprenante de sa mémoire sémantique, qui concerne les connaissances générales sur le monde, indépendantes du contexte d’apprentissage.

Durant cinq ans, les chercheurs ont observé chez C.J. une capacité exceptionnelle à mémoriser durablement des connaissances générales malgré ses troubles amnésiques profonds. À travers des tests impliquant l’apprentissage de sigles (tels que GDP, WHO, VAT), C.J. a démontré des résultats supérieurs à ceux de sa jeune sœur, témoin contrôle. En effet, cinq ans après les séances d’apprentissage, C.J. restituait correctement la signification de 83 % des abréviations, contre 92 % pour sa sœur après seulement neuf semaines.

Plus étonnant encore, C.J. était incapable de se souvenir des circonstances exactes dans lesquelles il avait appris ces sigles. Il déclarait spontanément connaître ces informations par diverses expériences personnelles antérieures, totalement fictives. Ainsi, malgré l’absence quasi complète de mémoire contextuelle, il parvient à stocker efficacement des connaissances générales.

Ce profil cognitif exceptionnel suggère clairement une dissociation entre les systèmes cérébraux responsables des mémoires épisodique et sémantique, renforçant l'hypothèse que ces deux mémoires sont sous-tendues par des réseaux neuronaux distincts. Ce cas vient enrichir les connaissances accumulées depuis le premier signalement d’une telle dissociation en 1997 par Vargha-Khadem et ses collègues chez trois jeunes patients présentant une amnésie développementale.